Message du cardinal L. Monsengwo devant la diaspora congolaise au Canada

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L'archevèque de Kinshasa, le cardinal Laurent Monsengwo Pasinya lors d'une conférence de presse le 10 novembre 2011 (AFP, Gwenn Duborthomieu)

 

Apres la célébration de deux  messes, Le Cardinal Laurent Monsengwo Pasinya a livré un important message le 08 juillet 2018 à la soirée organisée par la Commission Catholique Bondeko de la ville d’Ottawa à l’hôtel Crown Plazza. Il a brosse presque toute la situation chaotique actuelle de la RD Congo. Dans son mot, il a parlé de la détérioration de la situation économique, sécuritaire et humanitaire du pays. Ci-dessous nous vous proposons son message complet à la diaspora congolaise.

Je tiens de prime abord à remercier les organisateurs de cette soirée consacrée spécialement à la collecte de fonds pour les victimes réprimées brutalement et blessés mortellement lors de différentes manifestations organisées par le Comité Laïc de Coordination (CLC). Je tiens par la même occasion à saluer l’initiative pastorale prise ici à Ottawa et dans beaucoup d’autres regroupements de la diaspora congolaise de constituer des comités locaux pour soutenir et porter le plus loin possible les initiatives de structures de l’église.

Pour ma part, cet après-midi, j’ai célébré l’Eucharistie à l’aumônerie, j’en ai profité pour encourager les familles à tenir bon dans les épreuves ; à l’horizon de la rencontre sur la famille, je vous exhorte tous à vivre la joie de l’Evangile en famille.

Par ailleurs, la meilleure manière de m’adresser à vous, c’est de vous rappeler les grandes lignes des messages des archevêques, membres de la Conférence Episcopale  National du Congo, CENCO en sigle, réunis lors de la 54e assemblée plénière ordinaire à Kinshasa du 19 au 23 juin 2017. Nous avons clairement exprimé notre inquiétude et notre préoccupation puisque  le pays va mal.

La détérioration de la situation économique, sécuritaire et humanitaire ainsi que par l’impasse politique actuelle nous poussent à tirer encore la sonnette d’alarme. En ce jour la sante économique de notre pays est critique, elle empire au jour le jour. Le climat des affaires est plus que morose et décourage les investisseurs. La corruption, l’évasion fiscale, le détournement des fonds publics ont atteint les proportions inquiétantes à tous les niveaux.

Par conséquent, le pouvoir d’achat a sérieusement baisse au point que les familles peinent à joindre les deux bouts du mois. Pour la grande majorité de la population congolaise, les conditions de vie sont devenues plus que précaires. L’insécurité quasi-généralisée à travers le territoire national influe directement sur la vie des personnes. Elle porte atteinte à la dignité humaine et au respect des droits humains.

Nous déplorons des destructions méchantes dans le pays. 60 paroisses profanées et fermées, 31 centres de sante catholiques saccages, 141 écoles catholiques endommagées et fermées, 3698 habitations privées détruites, 20 villages complètement détruits ; certaines provinces dont le Nord Kivu, le Tanganyika et l’Ituri comptent également beaucoup de victimes humaines et des déplacés internes  du aux affrontements entre les forces de l’ordre et les rebelles.

Nous assistons aux restrictions du droit à la liberté d’expression et l’interdiction des manifestations pacifiques. La répression des mouvements de contestation pacifiques va parfois jusqu’à l’usage excessif de la force. Des défenseurs  de droits humains, des acteurs politiques et sociaux dont les voix divergent de la pensée du pouvoir sont régulièrement menaces ou font l’objet d’arrestations arbitraires. Les responsables de ces violations ne sont pas poursuivis par la justice et condamnes pour atteinte aux droits humains.

Au lieu de la décrispation politique consacrée dans l’Accord du 31 Décembre 2016, nous assistons plutôt au durcissement du pouvoir. Nous observons hélas une absence de l’autorité de l’Etat ainsi que du débat public et responsable sur toutes ces questions.

Certes la situation misérable dans laquelle nous vivons aujourd’hui est une conséquence de la persistance crise socio-politique due principalement à la non-organisation des élections conformément à la constitution de notre pays. L’accord politique du 31 décembre 2016 contient des pistes de solutions à la sortie pacifique de la crise. Par manque de volonté politique, la mise en œuvre de cet accord est insignifiante.

Au mépris de la souffrance de la population, les acteurs politiques multiplient des stratégies pour lui vider de son contenu, hypothéquant ainsi la tenue d’élections libres, démocratiques et apaisées. C’est pourquoi, nous exhortons toutes les parties prenantes à l’accord à assumer pleinement leur responsabilité de bonne foi et par amour pour la patrie. De prétendues solutions mises en place ne contribuent pas à la cohésion nationale et le risque plutôt de hâter l’implosion de notre pays.

Pour sortir de cette crise, la classe politique congolaise doit prendre en compte les vraies aspirations de la population ; le peuple ne doit céder ni à la peur, ni au fatalisme. Une minorité de citoyen a décidé de prendre en otage la vie de millions de congolais, c’est inacceptable. Nous devons prendre en main notre destin commun.

Il est plus que temps de poursuivre l’éducation civique et électorale ainsi qu’engagement actif et pacifique de tous enfin d’éradiquer les causes profondes de nos souffrances. En effet, la sortie pacifique de la crise actuelle exige la tenue des élections présidentielles, législatives et provinciales avant décembre 2018, tel que le prévoit l’accord politique du 31 décembre 2016.

Aller aux élections suppose l’enrôlement qui s’effectue, malheureusement, avec une lenteur inquiétante. Bien préparer les élections, c’est aussi se faire identifier et enrôler pour que la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) dispose d’un fichier électoral fiable pour convoquer le scrutin dans le délai convenu.

A vous aussi la diaspora de prendre en mains vos responsabilités comme fils et filles du pays et de porter votre pierre à l’édifice.

Par l’intercession de la Sainte Vierge Marie, notre Dame du Congo, que le Seigneur nous donne la clairvoyance de ce que nous devons faire et la force de l’accomplir pour un Congo meilleur plus beau qu’avant.

Gratias Kanianga MfumuNkento

ChariteNews