*Jean-Pierre Bemba, la Cour constitutionnelle n’a de choix que de valider sa candidature : quelques motifs substantiels de croire que la CENI inféodée a été instrumentalisée et désorientée.*

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< < La fonction de la Cour constitutionnelle n’est pas seulement de développer une argumentation formelle mais de rendre la justice, en veillant à ce que ses arrêts soient perçus comme tels.>> Lire Mohamed Bennouna, ”Le formalisme juridique, pour quoi faire ? ”, _in RAFNU_ , PUAM,Volume 30, 2011-1, pp.7-10.
*Par Me Éric Bilale*.
Le langage du droit donne certes aux juristes et aux praticiens les outils et les repères pour communiquer entre eux et faire progresser leur réflexion commune et c’est assurément une technique indispensable, mais peut-on en rester là, s’en tenir à la lettre en négligeant l’esprit?
Que le dossier *Jean-Pierre Bemba revête des aspects politiques dans sa gestion catastrophique par la CENI ne suffit pas à lui ôter son caractère juridique*. Quelques évidences juridiques ci-après dénotent combien la CENI a commis d’immenses bêtises que la Cour est appelée, absolument,  à réparer :
1. L’extrait de casier judiciaire établi par le Procureur général près la Cour de cassation  ( ex Procureur général de la République) et délivré au Sénateur Jean-Pierre BEMBA dit clairement que l’intéressé a été condamné en première instance, donc la décision n’est pas irrévocable (bien que pour l’instant aucune condamnation n’existe, tout a été annulé en attendant le 17 septembre). Étant, en l’espèce,  un _acte ad probationem_ authentique, c’est-à-dire un acte servant de preuve et faisant foi, la CENI, malgré la pression,  n’avait pas à aller chercher ailleurs, sur  internet d’autres solutions vides de sens, en lieu et place de se fier à l’extrait lui produit :
■la CENI, plutôt que se limiter à son rôle d’une Autorité administrative indépendante, s’est faite, comme par enchantement, juge international d’interprétation des arrêts de la CPI (oeuvre du juge).
*Note : les arrêts de la CPI ne peuvent être interprétés que par la CPI à la demande des intéressés, dans la logique de dissiper l’obscurité de sens. La CENI a eu tort de vouloir s’arroger un quelconque pouvoir d’interprétation de ces arrêts et d’avoir la prétention d’en produire des copies fabriquées, tirées et imprimées dans un Ghetto à Ngaba, sans source de provenance ni certification, au juge constitutionnel sur le banc  [nous pensons, sous réserves généralement quelconques, que cette légèreté qui attente au Règlement intérieur de la Cour constitutionnelle sera réprimée sévèrement par la composition].*
■ la CENI, par manque d’expertise en anglais juridique et, surtout, parce qu’ayant cherché à la hâte à interpréter le texte en anglais de l’arrêt sur la culpabilité du Sénateur Jean-Pierre BEMBA et le statut de Rome en anglais, elle a abouti, abusivement, à la conclusion selon laquelle  << le terme anglais *corruptly*…>> utilisé serait l’équivalent de la << *corruption*>> en français. Quelle bêtise !
*Note: nous sommes conscients de la baisse du niveau d’enseignement universitaire ces dix dernières années, du marchandage des diplômes de droit, mais cela n’autorise pas aux institutions de la République comme la CENI à faire recours aux apprentis sorciers. Un juriste averti doit avoir un réflexe quasi automatique que le <<Statut de Rome>> est une convention internationale, est un acte constitutif d’une organisation internationale  (CPI), partant, soumis aux règles et techniques d’interprétation prévues par la Convention de Vienne sur le droit des traités : << _toute interprétation ou appréhension d’une règle de Droit  est inadmissible si elle conduit à un résultat manifestement absurde ou déraisonnable_ >>  (article 31 de la convention de Vienne précitée). La CENI dont les experts n’avaient jamais lu la version anglaise du Statut de Rome est surprise par l’expression  << _corruptly influencing a witness_ …>> et, du coup, à ses experts de dire qu’il s’agit de la corruption. Non, c’est simplement l’équivalent en anglais de << _la subornation des témoins._ >> ( Lire l’article 70 du Statut de Rome en deux langues). En légistique, pour désigner une infraction, le législateur, à travers les énoncés, fait traduire les réalités qui s’attachent à l’incrimination. Par exemple, le cas de la corruption dans le statut de Rome, que se soit en français ou en anglais : < < _soliciting or accepting a bride as an official of the court in connection with his or official duties_ >> (sollicitation ou acceptation d’une rétribution illégale par un membre ou agent de la Cour Pénale internationale dans le cadre de l’exercice de ses fonctions officielles ), rien à avoir avec la subornation des témoins. Nous sommes un pays francophone, le texte en français fait foi, pourquoi chercher à aller vers un texte anglais qui trahit votre insuffisance technique en anglais juridique? Lorsqu’un traité a été authentifié en deux ou plusieurs langues, son texte fait foi dans chacune de ces langues lorsque les parties en ont voulu ainsi, le traité de Rome sur la CPI  n’en fait pas exception  (article 33 Convention de Vienne sur le droit des traités).*
2. Jean-Pierre Bemba n’a jamais été condamné par une décision irrévocable. La CENI, ensorcelée – comme l’a d’ailleurs rappelé le Professeur TASOKI, un des conseils du Sénateur Jean-Pierre BEMBA en pleine audience –  s’est livrée à un exercice ridicule, prenant une décision définitive pour une décision irrévocable.
*Note : une décision irrévocable est celle qui n’est plus susceptible des voies de recours extraordinaires. L’affaire Jean-Pierre Bemba est en cours et toutes les décisions prises sont susceptibles des voies de recours.  Pour condamner l’accusé, c’est-à-dire lui infliger une peine, la Cour doit être convaincue de sa culpabilité au-delà de tout doute raisonnable (Lire attentivement l’article 66 -3 du Statut de Rome ). Tant que la Cour n’est pas encore convaincue,au-delà de tout doute raisonnable,  de sa culpabilité précédemment établie par une décision, la condamnation est quasi impossible. La réalité actuelle de l’affaire Procureur c. Jean-Pierre Bemba et alii c’est que le juge d’appel n’est pas convaincu de la culpabilité du Sénateur Jean-Pierre BEMBA au-delà de tout doute raisonnable, c’est pourquoi il a procédé par cette technique remarquable  << _d’annulation-renvoi_ >>. Il annule la condamnation et renvoie l’affaire au juge de première instance pour une nouvelle décision. Ce n’est qu’une première annulation-renvoi, rien n’empêche qu’au prochain appel sur la condamnation, lorsqu’il estime de nouveau que l’oeuvre du juge de première instance est peu rationnelle,  le juge d’appel annule et renvoie ou annule et évoque, cette fois – là,  à la suite des éléments nouveaux et conformément à l’article 81-2-b du Statut de Rome, en annulant toute ou partie de la décision sur la culpabilité.*
3. La CENI a violé intentionnellement la loi électorale en son article 10. *Plutôt que constater les pièces, notamment l’extrait de casier judiciaire et se limiter au prescrit de la loi, la CENI a, non seulement fait oeuvre du législateur *<<en inventant une hypothèse d’inéligibilité pour condamnation provisoire, en première instance,  du chef de subornation>>*, mais également oeuvre du juge international d’interprétation de ses décisions ; *alors que l’article 10 alinéa 2 de la loi électorale impose que l’inéligibilité soit appréciée au jour du dépôt de la candidature, la CENI, sous pression, a fait croire au monde que même si le Sénateur Jean-Pierre Bemba n’est condamné irrévocablement par aucune décision, on devrait l’écarter du processus, absolument.*
*Au demeurant, la Cour constitutionnelle a vécu personnellement ces horreurs juridiques de la CENI. D’ailleurs, elle – même(la Cour), à travers sa composition, a rappelé à la CENI ( à ses experts en divagation) que la Cour n’est pas censée avoir comme source un quelconque point de presse ni se référer aux documents sans source sûre : la CENI n’est pas l’interlocuteur à titré de la CPI au Congo. S’il y a une notification à faire de la part de la CPI, il y a des canaux officiels bien connus. Ce ne sont pas des résumés confectionnés et imprimés dans un Ghetto à Ngaba qui vont faire dire à la Cour constitutionnelle des bêtises, jusqu’à atteindre gravement à l’image de la justice et de l’élite  congolaises ; ce ne sont pas des conventions internationales non ratifiées par la RDC ou ratifiées mais non encore publiées au Journal officiel qui vont discréditer toute institution. La Cour constitutionnelle a donc toutes les possibilités pour redorer l’image de notre justice et désobéir à toute tentative d’instrumentalisation.*
Le point de non retour.